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Numéro
16 De Los Angeles à Londres, chronique d'un reporter infiltré

De Los Angeles à Londres, chronique d'un reporter infiltré

ART & DESIGN

Découvrez les dessous de l'art contemporain avec Nicolas Trembley.

Jessica Craig-Martin Jessica Craig-Martin
Jessica Craig-Martin

Les groupes de luxe liés à la mode continuent leur expansion dans l’art contemporain. Après la désormais très installée Fondation Louis Vuitton, le (futur) musée Pinault à Paris et la Fondation Prada (dont les expos pendant la Biennale de Venise et celle de Francesco Vezzoli à Milan ont été très remarquées), c’est au tour du “jeanneur” Guess d’ouvrir un musée à Los Angeles.

 

Les deux frères Marciano, Maurice et Paul, ont connu une véritable success story. Au début des années 80, ils quittent Marseille pour Los Angeles et fondent une petite entreprise de denim qui s’imposera comme une des marques les plus médiatisées grâce à des campagnes de pub dans lesquelles posent des top models comme Claudia Schiffer, Carla Bruni ou encore Laetitia Casta.

 

Comprenant plus de 1 500 pièces, la plupart des années 90, la collection s’est installée dans un ancien temple maçonnique de Los Angeles. Un écrin gigantesque avec librairie et restaurant où, parmi les invités le soir du vernissage, on pouvait croiser Sharon Stone au bras de l’artiste Alex Israel.

 

Tout le monde l’aura lu, une toile de Basquiat a passé la barre des 100 millions de dollars dans une vente aux enchères, faisant de l’artiste un recordman. C’est le Japonais Yusaku Maezawa qui en a fait l’acquisition. Sa fortune, il la doit à sa société Zozotown, cotée en Bourse plusieurs milliards. C’est une plateforme d’achat d’articles de mode sur Internet. La peinture va rejoindre le futur musée que construit ce jeune collectionneur (41 ans) dans la préfecture de Chiba.

 

À Athènes, lors de la Documenta 14, un groupe de “LGBTQI refugee rights” (attention, c’est long : “lesbiennes, gays, bisexuels, transgenres, queers et intersexués pour les droits des réfugiés”) a volé une sculpture et ne la rendra pas. Il s’agit d’une œuvre de l’artiste espagnol Roger Bernat, qui est la réplique d’une pierre qui aurait été présente lors du procès de Socrate en 399 avant Jésus-Christ. Des réfugiés étaient payés pour la transporter dans différents lieux d’Athènes, le fac-similé devant ensuite rejoindre Kassel en avion pour l’ouverture de la seconde partie de la manifestation. Le groupe d’activistes l’a fait tout bonnement disparaître, affirmant que les millions de réfugiés qui venaient en Grèce pour améliorer leur vie n’étaient pas là pour être “achetés” ou “fétichisés”.

 

Les minorités ont trop souffert et elles en ont marre. Toute utilisation de leur culture est désormais ultra sensible et même l’art contemporain est touché. Au Walker Art Center de Minneapolis, l’artiste Sam Durant vient d’en faire les frais. Sa sculpture intitulée Scaffold, qui devait être installée dans le nouveau jardin de sculptures du musée, va être détruite avant d’être inaugurée (alors que par le passé elle avait déjà été montrée ailleurs). Cette œuvre de grande envergure, de deux étages, en bois, est constituée de potences qui font référence à des pendaisons qui furent organisées par le pouvoir blanc. L’une d’elles rappelle ainsi l’exécution de 38 Indiens Dakotas dans la ville de Mankato en 1862. Mais les descendants de ces natifs américains se sont catégoriquement opposés à toute réappropriation par un homme blanc à des fins “artistiques” de cet épisode raciste. Ils ont eu gain de cause.

 

En Angleterre (avant d’être rappelé à l’ordre par la commission électorale qui l’a sommé de retirer son offre), l’artiste invisible Banksy a décidé de faire don d’une édition de ses pochoirs à tous ceux qui voteraient contre Theresa May aux législatives. Il est 100 % anti-Brexit.