47


Commandez-le
Numéro
11 Designerr Grace Wales Bonner, winner of the LVMH Prize 2016

Rencontre avec Grace Wales Bonner, lauréate du prix LVMH 2016

MODE

Découvrez qui est Grace Wales Bonner, la jeune Anglaise lauréate du prix LVMH 2016 propose une mode masculine inédite qui mêle influences africaines et européennes.

  • Grace Wales Bonner par Cédric Delsaux

    Grace Wales Bonner par Cédric Delsaux Grace Wales Bonner par Cédric Delsaux

Elle n’a que 25 ans, et sa maturité étonne. Lauréate du prix LVMH 2016, Grace Wales Bonner a séduit avec un discours engagé et atypique le prestigieux jury constitué des directeurs artistiques de toutes les marques du groupe. Diplômée en 2014 de la Central Saint Martins, cette jeune Londonienne d’origine jamaïcaine conçoit sa mode en résonance avec une réflexion plus large sur l’image des hommes noirs dans nos sociétés occidentales contemporaines. Depuis son premier défilé en 2015 dans le programme Fashion East, ses collections pour hommes mêlant influences africaines et européennes se prolongent par un travail artistique : vidéos, textes, collages rassemblés dans sa revue intitulée Everythings for Real. Numéro a rencontré la jeune femme lors de la cérémonie de remise des prix LVMH.

Wales Bonner, collection automne-hiver 2016-2017.

Wales Bonner, collection automne-hiver 2016-2017.

Wales Bonner, collection automne-hiver 2016-2017.

Wales Bonner, collection automne-hiver 2016-2017.

Numéro : Au-delà de la mode, vous êtes également une artiste. Quelle est la relation entre votre travail de recherche et vos collections ?

Grace Wales Bonner : Effectivement, mon univers ne se limite pas à la mode. Je pars toujours d’une problématique très large, puis je cherche ensuite comment je peux traduire mes idées. Je ne me ferme aucune porte. Je me concentre alors sur la façon dont je peux traduire ces références dans une pièce finale.  Il faut être très précis. Ainsi, je pense que mon travail artistique et mes collections se nourrissent mutuellement.

 

Voyez-vous le vêtement comme un signe social ?

Absolument. Plus je me concentre sur la mode, plus je réalise à quel point le vêtement est un vecteur de communication. S’habiller est un acte plein d’émotion et de sens. Je veux que mes vêtements reflètent cela. Ce qui me motive particulièrement, c’est de donner une vision plus large de la culture noire, et d’ouvrir un questionnement sur la beauté masculine. 

Wales Bonner, collection printemps-été 2016.

Wales Bonner, collection printemps-été 2016.

Wales Bonner, collection printemps-été 2016.

Wales Bonner, collection printemps-été 2016.

La culture noire est peu représentée dans la mode, et souvent traitée à travers des clichés grossiers. Comment vous positionnez-vous par rapport à cela?

Montrer des Noirs ou traiter de la culture noire ne devrait pas être un gadget ou une tendance. Cette question a toujours été cruciale pour moi. Je me suis lancée dans la mode parce que les représentations existantes des Noirs n’entraient pas du tout en résonance avec la réalité de ma vie. Je voulais montrer une image de beauté, de sophistication et de dignité que je ne voyais nulle part.

 

Je suppose qu’il n’est pas question pour vous de réifier vos mannequins.

Surtout pas. J’ai besoin d’être très proche de mon casting. Je parle beaucoup avec mes mannequins, je m’inspire de leur ressenti pour concevoir mes vêtements. Je travaille avec les mêmes garçons de saison en saison. Je mets en valeur l’allure naturelle et la personnalité de chacun. Je veux montrer des garçons d’aujourd’hui, car ce sont eux qui m’inspirent.

Wales Bonner, collection automne-hiver 2015-2016.

Wales Bonner, collection automne-hiver 2015-2016.

Wales Bonner, collection automne-hiver 2015-2016.

Wales Bonner, collection automne-hiver 2015-2016.

Vos références proviennent-elles de la mode?

La plupart viennent d’autres disciplines. Je suis notamment très inspirée par le peintre Kerry James Marshall. Il peint, selon les conventions du portrait classique, des Noirs qu’il représente dans toute leur puissance, leur dignité et leur beauté. Les toiles rencontrent un succès commercial, or il se trouve qu’elles ont de très grandes dimensions, et si on les accroche dans un appartement, elles occupent vraiment l’espace. Tout à coup, les Noirs, qui sont sous-représentés, prennent une dimension dominante. Il s’agit donc d’une véritable stratégie de subversion, que je trouve très intéressante.

 

Quelle importance attachez-vous à la beauté de vos vêtements, qui croisent des influences africaines et européennes?

J’attache une grande importance à la fabrication, à la qualité des pièces. Quand on est un jeune créateur, il faut se donner du mal pour persuader les usines et les artisans. J’ai donc vraiment cherché à travailler avec des personnes qui croient en mon projet et qui veulent le soutenir. Avec ce prix que je viens de gagner, je vais pouvoir encore améliorer la qualité de mes pièces et explorer tant de possibilités.

 

 

www.walesbonner.net