Nous avions découvert Nikolas Gambaroff il y a quelques années alors qu’il vivait à Los Angeles. Ses tableaux étaient principalement composés de matériaux trouvés (pages de magazine, journaux…). Parfois, sur le châssis, la toile était remplacée par du film plastique à l’aspect miroir dans lequel le spectateur se reflétait. Certaines peintures s’affaissaient littéralement en devenant sculptures de silicone molles. Gambaroff rejette tout style reconnaissable et signature cohérente. Il a souvent collaboré avec d’autres artistes comme Kerstin Brätsch ou Ei Arakawa à travers des performances. Ce natif d’Allemagne enseigne aujourd’hui à Berlin. Ses nouvelles œuvres renouent avec une approche plus traditionnelle des matériaux, l’encaustique et la cire appliquées au pinceau, mais aussi avec une certaine histoire de la peinture allemande, celle de l’expressionnisme et du néo-expressionnisme. Il parle désormais de paysages, ou disons d’un horizon imaginaire qu’il va dévoiler aux États-Unis en 2022 à la galerie Overduin & Co.
NUMÉRO : Vous souvenez-vous de votre première rencontre avec l’art ?
NIKOLAS GAMBAROFF : Là, immédiatement, je pense à un paysage d’Albrecht Altdorfer, que j’avais vu enfant. Il a éveillé mon intérêt et m’a incité à regarder de plus en plus attentivement tout ce que nous appelons l’art. En ce moment, je passe un temps fou à revoir différentes interprétations de danses, particulièrement populaires, qui passent en boucle sur TikTok. Ce désir de devenir un mème et de l’incarner dans toute sa matérialité me fascine. La différence dans la réitération.
Quelle est, à vos yeux, l’importance de l’atelier ?
Je suis un artiste très centré sur l’atelier. Dans l’environnement où je me trouve – qu’il soit physique ou mental –, je suis constamment en quête de nouveaux espaces ouverts. L’atelier peut aussi avoir cette dimension-là, un espace surdéterminé, et pourtant véritablement libre
et ouvert… un refuge, une scène, une piste de danse, une tombe : tout ça en même temps.
Terminez-vous toujours une œuvre avant d’en commencer une nouvelle ?
La plupart du temps je travaille sur plusieurs pièces à la fois. Le travail commence à exister d’abord comme partie d’un tout, d’un corpus souvent très clairement structuré sous forme de séries. Mais, au bout du compte, chaque œuvre reste résolument individuelle. Je m’intéresse aussi beaucoup aux infimes différences que peut introduire la répétition.
Vous sentez-vous proche d’un mouvement ?
Les mouvements ont une vocation pragmatique.
Ils sont surtout utiles dans un but de communication ou pour les classifications historiques, souvent au prix d’une simplification excessive.
Y a-t-il quelque chose dont vous aimeriez faire prendre conscience à travers votre art ?
Ce que je désire, c’est engager un véritable mouvement de la pensée. J’espère avant tout l’inattendu. Je suis convaincu que désigner nommément une chose concrète la ferait s’évanouir, disparaître. Ne vous cantonnez pas à vos propres attentes, surprenez-vous !
Nikolas Gambaroff exposera à la galerie Overduin & Co. (Los Angeles) en 2022,
www.overduinandco.com