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11 Que penser de “Julie (en 12 chapitres)”, le film norvégien acclamé à Cannes ?

Que penser de “Julie (en 12 chapitres)”, le film norvégien acclamé à Cannes ?

Cinéma

Depuis sa première sélection à Cannes pour son adaptation du Feu follet (Oslo, 31 août), Joaquim Trier nous avait habitués à des films impressionnants de fureur et de simplicité mais bel et bien déprimants. Avec Julie (en 12 chapitres), il livre une œuvre sur l’amour, la tromperie, la rupture, les questionnements existentiels, les beuveries, la maladie… Bref sur la vie. 

  • © Oslo Pictures

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Du cinéma de Joaquim Trier, on connaissait sa capacité à émouvoir (parfois trop), à plonger le spectateur dans une douce léthargie, ou encore à l’enliser dans un sublime tableau de souffrance, le laissant pantois, mi-apeuré mi-subjugué, ou parfois carrément changé. Dans tous les cas, ce cinéma-là, centré sur le spleen, le deuil (Back Home), le cauchemar de l’addiction (Oslo, 31 août) et la déliquescence des relations amicales (Nouvelle Donne), fabriquait un imaginaire transcendant mais déprimant, où des personnages masculins semblent prêts à se défenestrer à chaque scène. Il faisait poindre, aux yeux du monde, un cinéma d’auteur norvégien ultra réaliste, même dépouillé, et impressionnant de fureur et de simplicité. Il révélait, aussi, un cinéaste qui, manifestement, en avait gros sur la patate. On ne s’attendait donc pas vraiment, depuis sa première sélection à Cannes pour son adaptation du Feu follet (Oslo, 31 août), à ce que Joaquim Trier livre un film sur l’amour, la tromperie, la rupture, les questionnements existentiels, les beuveries, la maladie… Bref sur la vie. 

 

Julie (en 12 chapitres) se place ainsi à la lisière de deux univers. D’un côté les errances osloïtes et les longues introspections habituelles du cinéaste et de l’autre, la légèreté de l’existence, les jeux de séduction, et l’incarnation du sentiment sans doute propre à la jeunesse : demain la vie peut basculer – mais en mieux. Surtout, le film met pour la première fois en scène un personnage féminin qui, contrairement à ses homologues masculins toujours englués dans leurs marasmes, est libre, désinvolte et émancipé. Il adhère aux questionnements contemporains, se demandant, comme des millions de trentenaires ultra connectés, si le travail qu’il a choisi est le bon, s’il veut mettre au monde un enfant dans une société prête à s’effondrer et s’il doit quitter la personne qu’il croyait être l’amour de sa vie. 

 

Renate Reinsve, qui a d’ailleurs reçu le prix d’interprétation féminine au dernier Festival de Cannes, incarne donc Julie, une jeune femme dont la vie est fixée sur les douze chapitres du film. Elle est comme bloquée, à Oslo, dans le théâtre de son existence : en couple avec Aksel (Anders Danielsen Lie), un auteur de bande dessinée controversé, elle se force à ne pas penser à l’homme qu’elle vient tout juste de rencontrer en soirée… jusqu’à ce que, lors d’une scène libératrice où le temps et les gens sont carrément figés, elle courre le retrouver pour l’étreindre. Enfin, elle se rend compte que l’on est au monde uniquement pour ça : connaître ce big-bang qui éradique tout autour de soi et nous propulse à des années lumière de la terre. Un sentiment que l’on appelle l’amour. Mais Julie, dans son élan d’expérimentations, ne tarde pas a réaliser que le sentiment amoureux est comme le désir, que l’on a à vingt ans, d’exercer tel ou tel métier : il évolue. Et le cinéma de Joaquim Trier aussi.

 

Julie (en 12 chapitres), de Joaquim Trier, avec Renate Reinsve et Anders Danielsen Lie, en salle mercredi.