Une jeune femme au corps sculptural se baigne lascivement dans une crique, en Méditerranée. La caméra la saisit en surplomb, depuis les hauteurs caillouteuses, comme s’il fallait offrir le cadre le plus étendu possible à sa liberté de mouvement. Ce sont les premiers instants majestueux du quatrième long-métrage de Rebecca Zlotowski. Après Belle Épine, Grand Central et Planetarium, l’ancienne élève de la FEMIS s’offre une embardée sauvage, presque une récréation, avec un film à la séduction immédiate tourné dans la chaleur de l’été. Dans le contexte français et même dans la filmographie de la réalisatrice, ce shoot de soleil et ce désir de légèreté font du bien. Une fille facile raconte les vacances d’une adolescente. Naïma vit à Cannes. Elle a envie d’aimer et d’être aimée, rêve de découvertes sensuelles et de sorties. Aux premiers jours de juillet, elle reçoit la visite de Sofia, sa cousine volage, sexuellement libérée (la baigneuse, c’est elle), qui l’aide à franchir un cap en l’invitant à la plage et dans les lieux de nuit ou les boutiques de luxe auxquelles Naïma n’avait jamais accès. Sofia va prendre toute la place dans son quotidien et bientôt dans le film. Nous parlons, littéralement, d’une apparition. Elle a pour nom Zahia Dehar, dont le prénom résonne familièrement. L’ancienne call-girl avait défrayé la chronique à la fin des années 2000 pour des relations tarifées avec des joueurs de foot. Elle tient ici son premier rôle au cinéma mais c’est comme si elle avait vécu toute sa vie dans l’illusion permanente d’être filmée. Nous sommes en présence d’une digne héritière des superstars warholiennes sixties, au-delà de la morale et des représentations dites correctes, qui impose son image et son rythme.
À vouloir jouer d’une ambiguïté sur le statut de l’héroïne, sans trancher sur la réalité de son pouvoir et de sa capacité d’agir, le film minore la portée politique de son geste.