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17 Qui est Vincent Garnier Pressiat, le créateur subversif plébiscité par Michèle Lamy ?

Qui est Vincent Garnier Pressiat, le créateur subversif plébiscité par Michèle Lamy ?

MODE

Glam rock, night-clubbing, années 20 et romantisme... Nombreuses sont les inspirations de Vincent Garnier Pressiat, jeune designer à la tête de son propre label, Pressiat, qu’il a lancé pendant le premier confinement en 2020. Grâce à son approche subversive de la mode, il est même parvenu à séduire Michèle Lamy, épouse et muse de Rick Owens. Pour Numéro, le créateur s’est confié sur ses débuts, son envie de présenter des défilés spectaculaires mais aussi sur la vision intransigeante qu'il défend avec son label.

Vincent Garnier Pressiat Vincent Garnier Pressiat
Vincent Garnier Pressiat

Le vendredi 1er octobre 2021, Le Rouge, boîte de nuit emblématique de Pigalle, accueillait le tout premier défilé du label Pressiat, fondé par le designer Vincent Garnier Pressiat pendant le premier confinement. Après une première collection automne-hiver 2021-2022 présentée de façon virtuelle en mars, le jeune designer a enfin dévoilé ses créations lors d’un défilé intimiste rappelant ceux des années 90. Sur un fond de musique techno, alors que les invités sont assis sur des fauteuils rouges ornés de dorures et de traces de cigarettes, les silhouettes se succèdent sur un podium éclairé par une lumière stroboscopique. Une mise en scène théâtrale qui n’est pas sans évoquer celle de certains grands créateurs comme Lee Alexander McQueen ou encore Jean Paul Gaultier, qui fascinent le jeune Français depuis toujours.

 

Si le noir s'impose comme la teinte fétiche du designer, Vincent Garnier Pressiat propose également des ensembles à imprimés flamboyants associés à des bottes lacées à plateformes surdimensionnées, des bodys et robes ultra sexy, ou encore des vestes dotées d’épaules imposantes. Un ensemble de silhouettes qui mêlent artisanat et références historiques, de l’époque victorienne aux Années folles, en passant par le glam rock et les seventies. Un style baroque et genderless qu’il avait déjà ébauché dans sa première collection, “Diamant de nuit”, dévoilée dans une vidéo tournée au Théâtre Daunou (Paris 2e). “J’ai d’abord voulu aborder le thème de la prohibition dans ma première collection, puisque nous étions en plein dedans avec le confinement. Puis, j’ai mis en avant le voyage et la fête avec mon défilé au Rouge, inspiré par le glam rock mais aussi par la culture tzigane”, confie Vincent Garnier Pressiat à Numéro. À l’âge de vingt-six ans seulement, le créateur s’est alors construit une identité forte et assumée, qu’il a longuement mûrie au fil des années.

La collection Pressiat automne-hiver 2021-2022 © Luka Booth

La collection Pressiat automne-hiver 2021-2022 © Luka Booth

La collection Pressiat automne-hiver 2021-2022 © Luka Booth

La collection Pressiat automne-hiver 2021-2022 © Luka Booth

Originaire de Besançon (en Bourgogne-Franche-Comté), Vincent Garnier Pressiat a toujours baigné dans le milieu de la mode. Auprès de sa mère, qui fut couturière pour de grandes maisons parisiennes avant de devenir professeure, le jeune homme s’est très vite pris d’amour pour la mode. “Depuis tout petit, je voyais ma mère coudre. Je vivais littéralement dans un atelier… mon grand-père était tailleur également. C’est un truc de famille chez nous”. Si Vincent a commencé sa carrière en habillant des poupées Bratz dont il appréciait particulièrement le côté ultra sexy et vulgaire, il se met ensuite à croquer des silhouettes afin d'intégrer la très réputée École de la chambre syndicale de la couture parisienne.

 

“Je voulais vraiment sortir de mon trou, alors je me suis battu pour y entrer. Mon entretien a d’ailleurs duré cinq minutes, puisqu’à peine entré dans la pièce, le directeur de l'école me dit : ‘tu pues la mode, c’est bon tu es pris’”. Cinq ans plus tard, Vincent Garnier Pressiat obtient alors son diplôme avec succès, malgré son style qu'il considère plutôt en décalage par rapport à la formation : “J’étais très axé cul, monde de la nuit… bien moins classique que les autres élèves." C'est cette vision subversive et authentique qui séduit d'abord John Galliano, directeur artistique de Maison Margiela, puis les maisons Saint Laurent et Balmain. “J’ai appris énormément de choses dans chacune de ces maisons, mais le Covid-19 est arrivé et j’ai dû quitter Balmain. C’était donc l’occasion pour moi de lancer enfin mon propre label.”

La collection Pressiat printemps-été 2022

La collection Pressiat printemps-été 2022

La collection Pressiat printemps-été 2022

La collection Pressiat printemps-été 2022

Épaulé par Victor Weinsanto, son meilleur ami (créateur également), ainsi que par Michèle Lamy, épouse et muse du designer Rick Owens, Vincent Garnier Pressiat développe alors de A à Z sa première collection pendant le confinement. “J’ai conçu les 69 pièces en trois mois, avec l’aide d’un seul assistant. Avec la vidéo tournée au Théâtre Daunou, c’était vraiment la première fois que je me mettais à nu en dévoilant mon univers. Cette collection n’était pas vendable, je voulais montrer ma technicité et mon savoir-faire. Tout était réfléchi en ce sens.” Plutôt que de construire un récit autour de sa collection, Vincent Garnier Pressiat imagine une galerie de créatures noctambules à l'aura magnétique. “Je m’inspire des gens que j’aime et des lieux qui me parlent, comme les boîtes de nuit ou les cabarets. Je trouve qu’il se passe quelque chose la nuit qu’on ne voit pas le jour. Même si mon label paraît dark, il n’est pas synonyme de mauvais ou de triste. J’essaye toujours de capter la lumière à travers ce qui est sombre, sale ou mal famés.”

 

Un univers aux contours bien définis qu’il met en scène à travers de véritables shows, à l’instar de son tout premier défilé présenté en octobre 2021, qui réunit un casting composé d'amis, performeurs, danseurs et même contorsionnistes. En complément de son label, Vincent Garnier Pressiat développe aussi sa passion pour l’art et propose ses créations sous le nom de Nikkria. “Je fais de la distorsion visuelle via des collages, et je décline cela en imprimés, affiches, covers d'album… Dans le futur, j’aimerais même en faire des collections pour la maison, sur des coussins, des sièges ou des objets trompe-l’œil.” Une approche dont la précision rappelle la haute couture, qu’il explorera au fil des prochaines saisons, en plus d'une exposition en février prochain, où ses collages seront mis à l'honneur à la galerie Ground Effect (Paris 3e).