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Numéro
16

La nouvelle exposition de la maison Guerlain : quand l'art s'empare des fleurs

Numéro art

En pleine semaine de l'art, la maison Guerlain inaugure dans sa boutique historique des Champs-Élysées “Les Fleurs du Mal”, une nouvelle exposition d'art contemporain. L'événement réunit les œuvres de vingt-six artistes autour des fleurs et du recueil de Charles Baudelaire.

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“Les Fleurs du Mal” : une exposition de la maison Guerlain pendant la semaine de l'art

 

Grand classique de la littérature romantique, Les Fleurs du Mal, célèbre recueil de poèmes de Charles Baudelaire, a pourtant connu un parcours émaillé de scandales. Quelques jours seulement après sa parution en juin 1857, plusieurs grands titres de presse accusent son auteur d’immoralité au point d’attirer l’attention de la justice, qui en saisit les exemplaires et lui intente un procès. L’écrivain français et son éditeur sont alors condamnés pour outrage à la morale publique et aux bonnes mœurs, contraints de verser une amende à l’État et de retirer six poèmes de l’ouvrage. Une censure qui, paradoxalement, entretiendra le mythe autour du recueil et le consacrera plus tard comme un chef-d’œuvre, dans son écriture comme dans ses transgressions.

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Charles Baudelaire et la maison Guerlain : un rapprochement insolite

 

L’ouvrage donne aujourd’hui son titre à la nouvelle exposition de la maison Guerlain, inaugurée durant la Semaine de l’art à Paris dans sa grande boutique des Champs-Élysées. Chaque année depuis 2006, celle-ci y réunit des artistes de tous horizons afin d’offrir un panorama des pratiques contemporaines. Après avoir exposé une vingtaine de femmes engagées l’an passé, la maison de parfums a invité le commissaire Hervé Mikaeloff à s’inspirer de l’œuvre sulfureuse de Baudelaire pour réunir les œuvres de vingt-six artistes de son choix, tels que Robert Mapplethorpe, Mimosa Echard et Yan Pei-Ming. Car l’histoire des Fleurs du Mal recroise en réalité celle de Guerlain autour d’une grande figure de l’époque: l’impératrice Eugénie, épouse de Napoléon III. En 1853, Pierre-François-Pascal Guerlain conçoit spécialement pour leur mariage le Flacon aux Abeilles qui deviendra l’une de ses signatures. Seulement quatre ans plus tard, en plein tourment autour de son ouvrage, Charles Baudelaire fera jouer ses bonnes relations avec l’impératrice pour solliciter son soutien et sa protection.

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De Jean-Marie Appriou à Mimosa Echard, des fleurs séduisantes et vénéneuses

 

Réparties sur les trois étages de la boutique Guerlain, les œuvres de l’exposition “Les Fleurs du Mal” incarnent les grands oxymores baudelairiens : la sexualité et la mort, la beauté et la laideur, le bien et le mal. En lien avec le monde du parfum, Hervé Mikaeloff leur a choisi comme épine dorsale les fleurs, espèces séduisantes mais non moins fragiles, voire dangereuses. Ainsi, un certain danger sommeille derrière le buisson ardent sculpté par Jean-Marie Appriou, derrière les plantes carnivores peintes par Marcella Barceló ou encore dans le dessin d’une frêle rose contenu dans une structure en métal et béton chez Alvaro Barrington. Entre une série d’aquarelles peu connues d’Anselm Kiefer et un buste féminin en pétales de fleurs fanées, céramique du Flamand Johan Creten, plusieurs pièces forment par ailleurs une véritable “ode à la femme”, en écho aux muses sensuelles et tentatrices si bien décrites par Baudelaire. Un corpus riche et éclectique, donc, qui témoigne de “la fragilité du monde en convoquant des images universelles”, explique le commissaire. Comme semblent le résumer les délicates fleurs enflammées, photographiées par l’artiste chinois Jiang Zhi: c’est lorsqu’elle est fugace que la beauté brille de sa plus grande incandescence. 

 

“Les Fleurs du Mal”, du 18 octobre au 13 novembre 2023 à la maison Guerlain, Paris 8e.