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Numéro
08 Que vaut “H24”, la série choc sur les violences sexistes avec Diane Kruger et Camille Cottin ?

Que vaut “H24”, la série choc sur les violences sexistes avec Diane Kruger et Camille Cottin ?

Série

Depuis le 23 octobre, Camille Cottin, Diane Kruger, Anaïs Demoustier et une profusion d’autres actrices prêtent leur talent à une nouvelle série d’Arte dénonçant les violences sexistes que vivent les femmes au quotidien.

C’est l’histoire d’une journée infernale. Vingt-quatre heures de tourments continus, si acérés et récurrents que personne ne pourrait les encaisser dans le monde réel. Pourtant, dans ce monde-là, certains doivent parfois y faire face. Ou plutôt certaines. Elles ont à supporter les frotteurs du métro, à exercer une pratique sportive avec un entraîneur trop collant ou à esquiver les coups de leur mari. Elles ont à vivre au quotidien dans une société où les violences sexistes sont tombées dans la banalité. C’est ce que montre H24 – 24 heures dans la vie d’une femme, une série de vingt-quatre épisodes de moins de cinq minutes, diffusée depuis le 23 octobre à 20 h 45 sur la chaîne franco-allemande Arte. Des saynètes qui nous plongent dans un abîme de violence ordinaire, débutant à Paris à 7 heures du matin dans un bus du réseau RATP, se poursuivant sur le dance-floor du mythique club parisien Le Palace et se terminant, on ne sait pas vraiment où, dans les draps froissés et trempés de sueur d’une femme harcelée.

 

À l’origine de ce projet, un chiffre rendu public (en janvier 2021) par la ministre déléguée chargée de la Citoyenneté, Marlène Schiappa : pendant le premier confinement, les signalements en ligne de violences sexuelles et sexistes ont enregistré une hausse de 40 %. Un constat effarant qui a révolté Nathalie Masduraud et Valérie Urréa, deux documentaristes qui ont réalisé, en 2018, un film sur les femmes photographes en Iran : “La série a été créée à partir d’une colère et d’un ras‑le-bol d’être toujours invisibilisées ou diminuées. On s’est alors demandé comment restituer le réel et la violence. Et comment arriver à prendre de la distance.” S’inspirant de faits divers survenus un peu partout en Europe, elles ont demandé à vingt-quatre écrivaines de se réapproprier ces récits et de les transformer en monologues. Les autrices françaises Lola Lafon, Chloé Delaume, Alice Zeniter [prix Goncourt des lycéens en 2017] ou encore l’Américaine Siri Hustvedt, la Polonaise Grazyna Plebanek, l’artiste Aloïse Sauvage [remarquée en tant qu’actrice dans 120 Battements par minute] et même l’ancienne garde des Sceaux Christiane Taubira ont donc répondu à l’appel. Sous forme de témoignages, leurs textes sont incarnés par vingt-quatre comédiennes, dont la plupart sont devenues, au fil des années, des visages familiers en France. Diane Kruger, Camille Cottin, Noémie Merlant, Anaïs Demoustier, Valeria Bruni Tedeschi… chacune porte, seule et face caméra, les stigmates de femmes violées, abusées, violentées, harcelées ou rabaissées, souvent dans l’omerta la plus totale.

Débarquant dans l’Hexagone et dans toute l’Union européenne – la chaîne Arte étant diffusée dans la majorité des pays membres –, H24 – 24 heures dans la vie d’une femme, hommage indirect au chef-d’oeuvre de Stefan Zweig (publié en 1927) qui décrit un personnage mis au ban de la société, révèle l’invisible au grand jour. La série zoome sur les agissements les plus violents mais aussi sur les plus insidieux, ces petits riens qui, comme le montrent les créatrices du programme, peuvent gâcher la vie et sont rarement dénoncés, dans la société ou dans la fiction. Car si nous sommes à l’ère post-#MeToo, que des essais féministes comme ceux de Mona Chollet battent des records de vente, que la parole se délie et que des femmes comme Sarah Abitbol ou Vanessa Springora dévoilent, dans des livres ou sur les plateaux télé, les violences qu’elles ont subies, personne n’avait encore osé afficher, à une heure de grande écoute, ces détails cauchemardesques pour celles qui les affrontent. Personne, non plus, n’avait encore envoyé un message direct de résistance à la Pologne ou au Texas, qui contribuent – avec leurs lois réduisant les délais pour avorter –, à faire reculer les droits des femmes dans le monde. Jusqu’à ce que Nathalie Masduraud, Valérie Urréa et leur cinquantaine de collaboratrices y parviennent, avec finesse, respect et pudeur.

 

H24 – 24 heures dans la vie d’une femme, une série créée par Nathalie Masduraud et Valérie Urréa, disponible sur Arte.tv.