Rencontre avec François Civil et Lyna Khoudri, le nouveau duo gagnant du cinéma français

Montmartre, un matin de mai pluvieux. François Civil et Lyna Khoudri s’apprêtent à débuter une journée entière d’interviews, écrites comme filmées, pour la promotion de leur nouveau film, Une zone à défendre, réalisé par leur ami Romain Cogitore. L'actrice fait sensation depuis plusieurs années, devenant l'étoile montante du cinéma français grâce à ses rôles de haute volée dans Papicha (2019), The French Dispatch (2021), Houria (2022) ou Novembre (2022)… Lui, n’est plus à présenter. C'est l'un des visages incontournables du grand écran hexagonal depuis plus de dix ans – Nos résistances (2011), Five (2016), Le Chant du loup (2019), BAC Nord (2021).

Mais, depuis quelque temps, c’est ensemble que ces derniers font sensation, prêtant à deux leurs voix pour le dernier Buzz l’éclair (2022) avant de partager l’affiche des deux volets du diptyque Les Trois Mousquetaires (dont le dernier vient de sortir ce mercredi 13 décembre 2023). Dans cette épopée spectaculaire, leur alchimie crève l'écran. Tout comme dans l'émouvant Une zone à défendre de Romain Cogitore, dévoilé en juillet 2023 sur Disney+. Lyna Khoudri joue Myriam, une jeune militante écologiste qui rencontre Greg, un policier infiltré interprété par François Civil. De cette histoire d’amour impossible transparaît la complicité sans équivoque des deux acteurs, qui donne à leur jeu sa force convaincante, jusque dans la réalité, où ils apparaissent complémentaires. Elle est éloquente, il est chaleureux : elle pense, beaucoup, il explique, beaucoup… Numéro est allé à la rencontre de ce nouveau duo inséparable du cinéma français.

Interview de Lyna Khoudri et François Civil, stars du film Une zone à défendre sur Disney+ et du film Les Trois Mousquetaires : Milady

Numéro : Vous êtes à l’affiche du premier film français original Disney+, “Une zone à défendre”. Qu’est-ce qui vous a convaincu de vous lancer dans ce projet ? 

Lyna Khoudri : C’est vraiment le scénario. C’était la première fois que je lisais quelque chose comme ça, qu’on avait accès à cet univers. Je ne connaissais pas du tout les ZAD [ndlr : formes de squats à vocation politique] et quand j’ai rencontré Romain [ndlr : Romain Cogitore, réalisateur du film], qui lui, y a passé beaucoup de temps, ça m’a vraiment captivée.

François Civil : Personnellement, j’ai un passif avec Romain Cogitore, pour lequel j'ai joué à 18 ans un des rôles principaux de son premier film, Nos Résistances. On a vécu ce moment un peu fort de nos vies où c’était le tout début de notre carrière à tous les deux, et puis on a continué à se parler et à se voir de manière sporadique, à discuter de cinéma… Donc quand il m’a proposé de jouer Greg [ndlr : son personnage dans le film], j’ai tout de suite dit oui.

Lyna, vous jouez une activiste très engagée et François, votre personnage finit lui aussi par être convaincu par son combat (écologique). Quelle résonance pensez-vous que ce film peut avoir ? 

Lyna Khoudri : J’ai toujours du mal à me dire que les films que je fais pourraient avoir une vraie résonance ou déclencher des choses. Ce serait trop prétentieux peut-être... Je dis toujours que j’aime juste le fait qu’on parle de ces sujets et que c’est toujours déjà un pas en avant. Avec ce film, c’est la première fois qu’on rentre vraiment dans une ZAD… J’espère juste qu’on n'a trahi personne, car il y a forcément une responsabilité qui vient avec le fait que l’histoire puisse résonner avec l’actualité. Mais c’est difficile d’anticiper l’impact que le film pourrait avoir.
François Civil : Oui, c’est vrai que l’impact est très dur à mesurer mais l’origine du projet, et ce qui nous a convaincus nous, c’est ça : essayer de montrer une ZAD, de manière plus réaliste que les représentations parodiques, cliché ou que l’on peut voir sur les chaînes d’informations qui nous rabâchent un peu les mêmes scènes d’émeutes. On a vraiment essayé de rendre hommage à ces personnes qui sacrifient une partie de leur confort pour leurs idéaux et leur engagement. Comme l’a dit Lyna, on a eu de la chance d’avoir Romain qui a beaucoup enquêté sur les ZAD et qui nous a nourris de tout ça. 

Êtes-vous vous-même engagés ? 

Lyna Khoudri : Mon plus grand engagement ce sont mes films, et les sujets qu’ils défendent et que je choisis de défendre aussi.

François Civil : Je m'inscris dans son sillon ! (Rires)

On retrouve dans ce film les codes de la comédie romantique. Les deux personnages se tournent autour, ont un coup de foudre, voient leur vie et leurs convictions chamboulées par cette nouvelle idylle, se déchirent avant de finalement se retrouver… Regardez-vous beaucoup de comédies romantique ? 

François Civil : J’adore About Time [ndlr : “Il était temps” de Richard Curtis, 2013] avec Domhnall Gleeson et Rachel McAdams.

Lyna Khoudri : Je crois que je ne l’ai jamais vu. 

François Civil : T’as pas vu ce film ? Mais il est génial ! C’est une comédie romantique, mais c’est aussi une histoire père-fils. Je trouve ce film bouleversant et très bien fait, justement car il sort un peu des sentiers battus. Parce que c’est vrai que, quand on parle comédie romantique, je pense à quelque chose qui me fait rire, à quelque chose de plutôt léger. Mais là, j'ai l'impression qu'Une zone à défendre c’est plus une tragédie romantique avec amour impossible rythmé par des trahisons, des mensonges… 

Lyna Khoudri : Je dirais Annie Hall de Woody Allen (1977), qui raconte une histoire d’amour un peu décalée que j’aime beaucoup et qui garde les codes de la comédie romantique. Mais c’est vrai qu'il faut que je réfléchisse à cette question pour les prochaines interviews !

Ça vous demande beaucoup de préparation, ces journées d’interviews ? 

Lyna Khoudri : Pour François et moi, oui ! (rires) Certains acteur gèrent plutôt bien cet exercice, mais nous…

François Civil : En fait, ce que je trouve particulier c’est qu’on est plus d’un an après le tournage du film de Romain. Quand je tourne, j’embrasse complètement le sujet au moment de la préparation et pendant la réalisation et, quand c’est terminé, je m’immerge à nouveau dans un tout autre projet. Donc c’est un exercice difficile de se ré-approprier ce qui nous a touché au moment où on a accepté un rôle en particulier ; surtout quand, comme ici, il y a un fond politique.